* Évaluation réalisée par le Climate Action Tracker (2015).

 

Le 30 juin 2015, le gouvernement chinois en visite à Paris a annoncé sa proposition d’engagement climatique pour Paris Climat 2015. Dans cette contribution, elle rappelle les termes de son accord bilatéral, conclu fin 2014, avec les États-Unis et y apporte quelques précisions, sans toutefois en changer l’ambition.

Ensemble, les États-Unis, la Chine et l’Europe représentent plus de la moitié des émissions totales de gaz à effet de serre dans le monde. La Chine représente 28% des émissions mondiales de CO2, ce qui en fait le plus gros émetteur mondial. Cependant, cette situation est récente. Elle fait suite à une augmentation rapide et sans précédent des émissions de gaz à effet de serre du pays. Sur la période 1850-2000, les émissions cumulées chinoises ne représentent que 11% des émissions mondiales cumulées. Mais au cours de la dernière décennie, les émissions chinoise ont doublé, de même que les émissions par tête (8 gigatonnes de CO2 par habitant, sans enlever les émissions exportées). C’est le niveau d’émissions d’un Européen.

Les États-Unis, la Chine et l’Europe représentent ensemble plus de la moitié des émissions totales de gaz à effet de serre dans le monde.

Dans sa contribution nationale, la Chine réaffirme un pic de ses émissions de CO2 au plus tard en 2030, avec la possibilité d’y parvenir avant. Il réaffirme également la part de 20% d’énergies non fossiles à atteindre dans la consommation d’énergie chinoise d’ici à 2030.

On notera que cet effort sur le mix énergétique est déjà conséquent, puisqu’il signifie développer 800 à 1 000 gigawatts de nouvelle capacité de production énergétique non fossile, soit à peu près l’équivalent des capacités de production d’électricité actuelles aux États-Unis. La Chine n’a pas précisé quelle part serait remplie par les énergies renouvelables, et quelle part serait remplie par le nucléaire. Pour les ONG, 100% de cet objectif devrait être rempli par le déploiement des énergies renouvelables.

Avec cette première annonce inscrite officiellement à l’Onu, la Chine montre qu’elle est désormais prête à participer, à son niveau, à la coopération internationale pour maintenir le réchauffement planétaire en-deçà de 2°C par rapport à la période pré-industrielle… Au contraire des pollueurs historiques que sont les Etats-Unis, l’Europe, le Canada etc. qui refusent toujours de prendre leurs responsabilité. Cette annonce chinoise peut donc marquer le début d’un rôle très actif de la Chine dans la lutte internationale contre le dérèglement climatique.

L’engagement chinois montre aussi que l’action sur le climat est non seulement possible, mais aussi bénéfique. C’est la principale motivation des Chinois pour agir. La Chine est en train d’opérer un tournant économique profond, se traduisant par une réduction de l’utilisation des énergies fossiles pour accroître les énergies renouvelables. Ces transformations en cours ont des conséquences directes sur le niveau mondial des émissions mondiales de gaz à effet de serre. La nature des motivations chinoises est un enseignement important pour les grands pollueurs historiques (États-Unis, Russie, Europe, Canada, Japon, etc.), qui ont présenté des engagements bien plus modestes et demeurent aveugles face aux nombreux avantages apportés par la transition énergétique.

La contribution chinoise pour la COP21 aurait pu être plus ambitieuse, ce qui aurait conféré au pays un rôle de leader climatique. Il y a un décrochage entre la réalité et ce que la Chine propose au sein de l’Onu.

Cependant, la contribution chinoise pour la COP21 aurait pu être plus ambitieuse, ce qui aurait conféré au pays un rôle de leader climatique. En effet, la Chine pourrait remplir plus que sa part du contrat au niveau international, compte tenu de la rapidité des changements en cours en Chine. Il y a donc un décrochage entre la réalité de la transition énergétique en Chine, et ce que le gouvernement de Pékin propose dans le cadre des Nations unies. Au rythme où se développent les énergies renouvelables en Chine, et compte tenu de la baisse de la consommation de charbon, elle pourrait prévoir de stopper la hausse de ses rejets de gaz à effet de serre bien plus tôt que 2030, aux alentours de 2020. C’est réaliste avec la transition énergétique en cours en Chine. Et cela aurait un impact considérable sur la stabilisation du climat et sur le succès des négociations de l’ONU, avant la Conférence de Paris sur le climat en décembre.

Sur le pic d’émissions, plus précisément, la plupart des analyses économiques montre qu’il devrait intervenir plus tôt : 2025 aurait été réaliste (voir Stern et al. 2015) compte tenu de la baisse de la consommation de charbon depuis 2 ans. D’autres analyses, donc celles des ONG chinoises, pensent qu’un pic de émissions en 2020 est possible et comporterait de nombreux avantages (voir l’étude de l’Institut New Climate, 2015). La Chine devrait prendre acte de cette réalité dans son engagement pour la COP21 de Paris. A noter que, pour que le pic des émissions chinoises aide à contenir le réchauffement, il faut non seulement qu’il intervienne le plus tôt possible, mais aussi que les émissions chinoises commencent rapidement à décliner (plutôt que de rester stables pendant une longue période).

Sur l’intensité carbone (CO2 émis pour produire une unité de PIB), si le chiffre de -65% se confirme, il s’agit d’une projection moyenne. Il existe des scénarios plus ambitieux. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime, dans ses scénarios permettant de rester sous la barre de 2°C, que la Chine devrait plutôt réduire son intensité carbone de 80% d’ici à 2030.

En Chine, les politiques publiques existantes (sur le développement des énergies renouvelables notamment) ne seront pas suffisantes pour aider à contenir le réchauffement et pour atteindre l’objectif proposé de 20% de renouvelables en 2030. Il faudra que le pays adopte de nouvelles mesures pour attendre son objectif à horizon de 2030. En termes de nouvelles capacités d’énergies renouvelables (solaire, éolien, hydraulique et biomasse), cela représente l’équivalent de ses capacités actuelles de centrales au charbon. Et autant que la totalité des capacités actuelles de production d’électricité aux États-Unis.

 

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