Le 31 mars 2015, la Russie a annoncé un engagement climatique pour 2030… qui est le même que son engagement précédent, pour 2020 ! Autrement dit, le pays, qui représente près de 5% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, repousse à 2030 les objectifs qu’il devait atteindre en 2020. Il propose de baisser ses émissions de gaz à effet de serre de -25 à -30% d’ici à 2030 par rapport à 1990. Cela correspondrait au mieux à une baisse infime des émissions du pays entre aujourd’hui et 2030, tandis qu’il faudrait commencer à les baisser rapidement pour avoir une chance de rester sous le seuil de 2°C d’augmentation de la température mondiale.

Pire, Moscou intègre dans son objectif 2030 la séquestration du CO2 dans ses immenses forêts. Plus précisément, le gouvernement russe rend son INDC conditionnelle à l’utilisation des règles les plus optimistes (voire laxistes) pour comptabiliser le CO2 des forêts et ainsi maximiser leurs puits de carbone.

En outre, la Russie n’explique pas quelles règles elle a utilisées pour faire ses projections dans ce secteur. Il aurait été bien plus ambitieux de séparer les secteurs énergétiques, industriels, etc. du secteur des forêts, et d’appliquer à ce dernier un objectif à part, visant à valoriser les stocks de CO2 contenus dans les forêts de Russie.

La Russie, qui traverse une situation économique difficile, reste myope face aux opportunités économiques et industrielles (emploi, innovation, économies d’énergie) de la transition énergétique. Rappelons que ce pays a connu une chute rapide de ses rejets de gaz à effet de serre entre 1990 et 2012 (date de la fin des premiers engagements sous le protocole de Kyoto), à cause de deux facteurs. D’abord, l’effondrement en 1990 du bloc soviétique et du tissu industriel qui l’accompagnait (environ -30% de baisse d’émissions), un argument historique que Moscou utilise régulièrement dans les négociations internationales sur le climat.  Cette réduction ne s’est pourtant pas traduite par une transformation profonde de l’économie russe pour ne plus dépendre des énergies fossiles et aller vers les énergies renouvelables, bien au contraire. Ensuite, parce que ses forêts sont passées de l’état de de secteur émetteur net (déforestation, feux) à celui de puits de carbone net.

Alors que le GIEC dit que nous devons laisser les 2/3 de nos réserves de combustibles fossiles dans les sols afin de respecter le seuil de réchauffement de +2°C, la Russie aurait tout intérêt à entamer sa transition énergétique.

Pour être sur une trajectoire équitable de respect du seuil de 2°C de réchauffement planétaire, la Russie doit impérativement revoir son engagement à la hausse.

* Analyses réalisées par le Climate Action Tracker (2015).

suite

Gabon

Les derniers billets du blog

Les actualités climat décryptées par le Réseau Action Climat

tous les billets