13 novembre 2015
Deux semaines avant le début de la COP21, la ministre de l’écologie a présenté le 13 novembre un bilan de l’application de la loi de transition énergétique. Selon elle, la France serait exemplaire pour le climat. Si des avancées sont indéniables, le rythme des changements n’est pas encore suffisant. Qu’il s’agisse de fiscalité écologique ou de développement des renouvelables, la France peut et doit aller plus loin et plus vite. Et des choix clairs doivent être actés avec la fermeture de Fessenheim et l’arrêt du projet de Notre Dame des Landes.
Hausse de la fiscalité carbone – Une bonne mesure à renforcer
La ministre a annoncé une hausse de la composante carbone à 30,5 € la tonne de CO2 en 2017 (contre 22 € la tonne de CO2 en 2016). Il s’agit ici d’un petit pas pour atteindre de manière linéaire l’objectif de 56 € la tonne de CO2 prévu en 2020 par la loi de transition énergétique pour réduire de manière efficace les émissions de gaz à effet de serre. Néanmoins, les prix bas du pétrole auraient été une opportunité pour anticiper davantage la hausse de la composante carbone sans grever démesurément le budget des ménages et porter la tonne de CO2 à 39,50 € en 2017. Il est important de rappeler que le rapport Quinet qui a servi de base pour la fixation à 56 € la tonne de CO2 en 2020 préconisait un prix de 45 € en 2017. Nous en sommes loin !
Par ailleurs, les professionnels et les particuliers ont besoin d’avoir une visibilité sur plusieurs années pour faire des choix vertueux mais aussi intéressants économiquement. Nous demandions donc à inscrire dès le projet de loi de finances rectificatif, des valeurs annuelles de la composante carbone jusqu’à 2020. Il sera difficile pour les acteurs économiques d’orienter leurs investissements vers une économie bas carbone si le gouvernement ne propose un montant que pour 2017. Les parlementaires pourront rectifier le tir.
Enfin, certaines énergies fossiles bénéficient encore d’exonération de la composante carbone. C’est le cas du kérosène utilisé comme carburant dans le transport aérien alors que celui-ci constitue le mode de transport le plus polluant et du gazole utilisé par les poids lourds car ils bénéficient d’un remboursement. Résultat, le train, comme mode de transport de voyageurs et de marchandises, pâtit de ces traitements de faveur, au détriment de la transition énergétique dans les transports. De même, en l’absence de décret rendant obligatoire l’indemnité kilométrique vélo, ce mode de déplacement pratique, économique et propre reste dévalorisé.
Utilisation des ressources de la fiscalité carbone – Cibler les priorités
La hausse de la fiscalité carbone doit être une opportunité de financer les actions de transition énergétique prioritaires, en particulier celles qui nécessitent des fonds publics. Il s’agit en particulier des investissements dans les transports en commun et le fret ferroviaire. La lutte contre la précarité énergétique doit également être une priorité pour qu’une hausse du prix de l’énergie ne pénalise pas les ménages modestes. Ceci doit passer par un chèque énergie d’un montant d’au moins 400 € par an pour les ménages concernés (alors que la facture énergétique annuelle est en moyenne de 1 700 €) et par une généralisation de la rénovation énergétique de leurs logements.
Pourtant, Christian Eckert évoque une utilisation des ressources liées à la hausse de la composante carbone en 2017 pour contribuer au financement de la CSPE. Si cette option était retenue, elle aurait pour effet de favoriser le chauffage électrique qui est pourtant loin d’être une solution performante, en particulier avec la pointe de consommation en fin de journée.
Programmation pluriannuelle de l’énergie – Il manque toujours la vision d’ensemble
La programmation pluriannuelle de l’énergie a été une grande avancée de la loi de transition énergétique. Elle doit offrir une vision globale en partant de scénarios de consommation et en déclinant toutes les sources d’énergie.
Pourtant, les premières orientations annoncées par la ministre ne donnent aucune indication sur le scénario de consommation retenu, en particulier pour l’électricité. Seule la production d’énergies renouvelables est précisée. Sans orientations sur l’évolution de la consommation et sur les autres sources de production d’électricité, notamment le nucléaire, les objectifs d’énergies renouvelables risquent de rester des voeux pieux.
Par ailleurs, les objectifs fixés pour les énergies renouvelables ne nous mettent pas sur la trajectoire pour atteindre les objectifs de la loi de transition énergétique, que ce soit pour le développement des énergies renouvelables ou encore pour la baisse de la part du nucléaire. Le compte n’y est pas !
La transition énergétique doit aussi passer par des choix structurants comme la fermeture de Fessenheim et l’arrêt du projet d’aéroport de NDDL.
Crédits photo : Olivier Bacquet
Les actualités climat décryptées par le Réseau Action Climat